Des consommateurs mieux informés et plus exigeants
« Les consommateurs aspirent aujourd’hui à un mode de vie plus vertueux, et cela a des retombées directes sur le panier et l’assiette », observe Romain Le Texier, Directeur des études du Cniel, qui note cependant que « le plaisir reste primordial, même s’il ne correspond pas aux mêmes produits selon les générations. »
Cette attention accrue des consommateurs à la provenance et à la composition des produits, aux modes de production, et de manière plus générale, à la responsabilité des entreprises, se retrouve sur le marché de l’emploi. Les valeurs incarnées par l’employeur et ses actions concrètes en faveur de l’économie, de la société et de l’environnement, sont désormais décisives pour la majorité des candidat.
Renforcer la transparence, bannir le greenwashing
Dans ce contexte, les filières agricoles et les industries agroalimentaires doivent renforcer à la fois leurs engagements et la transparence de leurs activités, afin de mieux informer leurs parties prenantes et bâtir avec elles des relations durables et de confiance. « Cet impératif de communication doit néanmoins se distinguer de toute forme de greenwashing », avertit Nicolas Marotte, Directeur Général d’Innocent. « Communiquer sur son engagement à mauvais escient finit par être contre-productif pour l’ensemble de la chaîne ».
Ainsi, pour Marie Petitcuénot, Head of Impact & Equality Lead chez Salesforce, « l’ère du storytelling a laissé place à l’ère de la data-mania : ce qui importe dorénavant, c’est de pouvoir mesurer son impact et prouver ses actions. » De nombreux labels et certifications visent justement à évaluer de manière quantifiée et fiable les actions engagées par les entreprises et la responsabilité des produits en rayon.
Certifiée et labellisée b-corp en 2018, Innocent croit fermement au pouvoir des marques à être « de puissantes caisses d’amplification sur les problématiques environnementales », comme l’explique son Directeur Général. Mesurer pour progresser, donc, mais aussi pour promouvoir un modèle économique vertueux auprès du marché comme des consommateurs.
Une dynamique collective nécessaire
Un pouvoir d’influence d’autant plus important que l’engagement ne doit pas se limiter aux seules entreprises mais constituer une véritable dynamique collective impliquant chaque acteur d’un bout à l’autre de la chaîne. Emmanuelle Paille, Directrice RSE & Communication de Bel France, le souligne, « l’un des points clés de le RSE est d’arriver à convertir des plans d’engagement d’entreprises en plans collectifs et à instaurer une discussion commune entre pouvoirs publics, producteurs, transformateurs, distributeurs, consommateurs et associations. »
Au cœur de cette approche collective de l’engagement : la question de la rémunération des producteurs. « La transition environnementale de l’alimentation ne peut se faire que si chaque maillon y trouve son compte », rappelle Romain Le Texier. « Rétribuer les éleveurs à leur juste valeur, c’est leur donner les moyens de se transformer durablement. » Une réalité dont les consommateurs semblent peu informés, regrette le Directeur des études du Cniel, qui alerte sur les écarts entre les intentions et les actions des nouvelles générations : « Les jeunes sont plus sensibles aux sujets environnementaux et de société, mais paradoxalement, ils cuisinent moins et font primer la praticité dans leurs comportements alimentaires. »
Revaloriser l’alimentation pour agir sur la durée
Responsabiliser les consommateurs en matière de développement durable devient alors essentiel, et cela passe par une meilleure justification des prix, ainsi que par la revalorisation de l’alimentation comme levier d’action. Emmanuelle Paille en a d’ailleurs fait son crédo : « l’assiette est un formidable bulletin de vote ».
Dans un monde agité par les crises sanitaires, géopolitiques et économiques, il est souvent tentant de raisonner court-terme, mais pour créer de la valeur sur la durée, il est néanmoins indispensable de travailler sur le temps long. « C’est le fondement des interprofessions comme le Cniel », conclut Romain Le Texier.